NOTRE repas d'anniversaire 2022
Comme nous l'avons fait déjà plusieurs fois, mon ami Olivier C et moi avons fait un repas à 4 mains pour fêter notre anniversaire. Si nous en discutons depuis le mois d'août, nous n'avons pu le faire que mi-octobre, car il y avait toujours un ou deux convives qui n'était pas dispo. Mais finalement, ce n'est pas plus mal : ça a permis de mieux tester les recettes.
Le repas démarre avec des gaufres de pomme de terre & crème fouettée à la truffe (mélano congelée) préparées par Olivier. Pour l'instant, je suis dans la détente – après une matinée éprouvante en cuisine, tout de même. J'en oublierais presque que d'ici peu, je vais devoir me remettre aux fourneaux.
Pour accompagner les gaufres, un Champagne Grand Cru Blanc de Blancs 1990 de Legras. La robe est bien dorée, avec des bulles assez rares. Le nez est intense, sur le pralin, la brioche toastée et la noisette grillée. La bouche est aussi ample que longiligne, étirée par une acidité traçante, avec des bulles tres fines, frémissantes, apportant du peps à ce trentenaire. Le tout est élégant er aérien, ne faisant pas du tout son âge. La finale offre de nobles amers et une fine astringence crayeuse, complétés par des notes toastées et épicées.
Puis Olivier nous sert un tartare de maquereau et une tuile au sésame. Dans le tartare, on retrouve des dés de chou rave (pour le croquant), du citron confit (pour la fraîcheur), des pignons de pins et des éclats de noisettes grillés (parce que c'est bon !).
Un Chablis 2010 de Droin lui tient compagnie : sa robe est or aux reflets argentés, sans la moindre trace d'évolution. Le nez est fin, pierreux, sur des notes d'embruns marins et de mousseron. La bouche est ronde ample, fraîche, aérienne, évoquant le "jus de cailloux" légèrement citronné. La finale nous fait un joli Triple A, associant l'Acidité, l'Amertume et l'Astringence du citron, de façon très subtile, avec une persistance sur des notes salines
Pendant ce temps-là, j'ai mis à réchauffer en douceur ma choucroute de la mer en chartreuse, mais aussi la crème qui l'accompagne, non phothographiée. L'idée de départ était d'avoir une choucroute qui puisse se marier parfaitement avec un riesling. Parce que depuis 15-20 ans, avec la hausse des maturités, ça devient compliqué. Je pense avoir trouvé la recette qui puisse relever le challenge. De la version traditionnelle, j'ai gardé la saucisse fumée, les gendarmes et la poitrine fumée. Et j'y ajouté du saumon, du haddock et une noix de Saint-Jacques (plus tiédis que cuits), ainsi que du citron confit (sucré / salé comme je le fais depuis plusieurs années). La crème est infusée avec les charcuteries et les "déchets" des poissons, puis traitée comme une crème anglaise. En toute fin, je lui ajoute un peu de citron confit.
Ce plat a magnifié un Riesling GC Muenchberg 2007 d'André Ostertag. Sa robe est d'un or intense. Le nez est superbe, sur le citron confit,, les terpènes d'agrume, la bergamote et une pointe fumée / pétrolée. La bouche est élancée, déployant une matière moelleuse, à l'aromatique confite mais fraîche, avec un côté séveux, à la limite de la suavité. La finale monte encore un cran dans l'intensité, avec de magnifiques amers sur les agrumes confits, et une persistance sur les épices et la fumée. Superbe vin et accord à tomber (la grande émotion du jour, sans hésitation).
Ce pithiviers de pigeon et foie gras signé Olivier permet de faire la transition vers les vins rouges. Tout est parfait, que ce soit les cuissons ou la texture et le goût de la farce fine. Il était complété par un goûteux jus de pigeon.
J'ai amené le Nuits Saint-Georges 1er Les Saint-Georges 2013 du domaine Chicotot qui l'accompagne. Sa robe est rubis légèrement évolué. Le nez est fin, fumé, sur le sous-bois automnal et la cerise. La bouche est fine racée, étirée par une acidité frétillante, avec un très beau fruit frais (griotte). La finale est encore plus fraîche et acidulée, sur la framboise, la griotte et la terre hupide. C'est super bon, à point, et s'accorde très bien avec le plat.
A partir de ce plat, je suis le seul chef en cuisine. On commence par de l'expérimental, dans un esprit terre-mer, mariant le rouget et l'agneau. Au premier plan, le rouget mi-cuit – enduit d'un beurre au foie de rouget – au second, de la poitrine d'agneau grillée. Il y a aussi une purée de pomme de terre et panais, relevée par de l'ail fumé confit.
... et un jus agneau & rouget !
Pour mes 55 ans, j'ai décidé d'ouvrir enfin ce Rayas 2001 que j'ai depuis un bail en cave. Sa robe est grenat lègerement évolué. Le nez est fin, complexe, sur la prune, les épices; le zeste d'orange, la rose fanée. La bouche est très ample, douce, caressante, déroulant une matière sensuelle, raffinée, aiguillonnée par l'amertume de l'orange. La finale est intense, dans un registre sévo-balsamique, avec une persistance sur l'orange amère. C'est très (très) bon, mais il ne m'offre pas l'énorme claque qu'ont pu me donner d'autres bouteilles de cette cuvée.
Rien qu'à la composition de l'assiette, on devine que je vais servir un vin jaune : copeaux de comté de 30 mois saupoudrés de curry, noix caramélisée et crème aux morilles et comté.
J'ai sorti mon plus beau vin jaune pour l'occasion : un Château-Chalon 1999 du domaine Macle. Sa robe est d'un or intense tirant vers l'orangé. Le nez est puissant, sur le curry, la croûte de comté, la morille sèche et le fenugrec. La bouche aérienne allie ampleur et tension, avec une acidité arachnéenne qui l'étire longuement, et une matière très fine, presque gazeuse, qui conjugue douceur tactile et énorme intensité aromatique. La finale est corsée, épicée, tout en restant très douce, avec une grande persistance sur le curry et la croûte de comté. Du très haut niveau, comme souvent chez Macle.
En pré-dessert, deux créations que je voulais faire goûter à mes amis : un sorbet à l'agastache (blanc) et une crème glacée à la feuille de figuier (vert). Les deux ont beaucoup plu !
Pour finir, une tarte tatin pomme / coing / yuzu et une crème glacée pomme & coing.
Et un liquoreux apporté par Olivier : un vin de France La Guimardière 2010 du domaine les Pierres sèches (devenu depuis Roches sèches), un chenin du Layon élevé durant 5 ans en barrique, et tellement riche qu'il n'a pas réussi à dépasser les 9 % d'alcool. La robe est entre le cuivre et l'ambre. Le nez évoque la pâte de coing, la pomme rôtie au caramel et les épices. La bouche est ronde, très ample, enveloppante, offrant une matière voluptueuse d'une grande intensité aromatique. Elle est tellement riche que l'acidité a du mal à l'équilibrer. On est vraiment à la limite, mais du bon côté de la force. La finale exubérante est un hymne à la gelée de coing, avec une persistance sur le caramel au beurre salé. Dur de croire qu'il n'y a que du raisin dans ce vin !
Les héroïnes du jour !