Encore une belle soirée mets et vins (ou une cuisine à quatre mains)
L'idée avait été lancée par Stéphane de faire un repas à quatre mains. J'ai tout de suite accepté car l'idée me séduisait. C'est plus sympa de cuisiner à plusieurs, et de surcroît enrichissant pour les deux participants. Stéphane m'a proposé un certain nombre de recettes, toutes venant du blog de Chantal (ils font un fixe sur Chantal, mes potes, va comprendre...). J'ai choisi celles qui me causaient le plus, puis consulté le contenu de la cave de Stéphane pour voir les vins qui se marieraient le mieux avec.
La journée de préparation fut à la fois cool et intense. Il y a eu du boulot d'abattu sans le moindre stress. J'avoue que je serais prêt à faire ça à chaque fois ;-) Nous avons commencé le repas avec du jambon de "cul noir", au goût très intense, à la salaison et au séchage rien moins que parfait. Et juste au-dessus, ce sont les fruits du hêtre décortiqués, grillés et enrobés de sauce soja pour bien les saler. C'était sympa comme tout (non, ça, ce n'est pas une recette à Chantal...). Pour accompagner cette "mise en train", une bulle 100 % Syrah, forcément étonnante, qui a bien plu à tout le monde :-)
Commençait ensuite le "vrai repas"
Cette recette est née durant la journée, suite à des déboires sur la qualité des pommes Granny, vraiment pas terribles. Du coup, elles ont mariné dans le jus de fruit de la passion et sont devenus beaucoup plus sexys. Les huîtres ont été pochées une à une 15 secondes dans leur eau portée à 75 °C. Puis rafraîchies et essorées sur de l'essuie-tout. Et enfin coupées et ajoutées au mélange pomme/passion. Ces huîtres avaient pour mission d'accompagner un Grüner Veltliner Urgestein Terrassen de FX Pichler. Un vin droit et frais, tendu, cristallin, aux notes minérales et citronnées, qui répondait parfaitement au plat. C'était l'occasion de découvrir pour certains un cépage non cultivé dans notre pays.
A souligner qu'il n'y avait absolument aucun assaisonnement au plat : le sel de l'huître et l'acidité relevée du jus de la passion se suffisaient à eux-même. Ceux qui craignent d'ailleurs l'acidité peuvent même ajouter un peu de sucre pour l'arrondir un peu (de mémoire, j'ai mis un trait de sirop d'agave, non perceptible).
Alors, là, cette recette, ça devait être au départ celle-ci. Nous n'en avons retenu que la poudre de baie de genièvre. On a testé le mélange yaourt/orange mandarine, et franchement, c'est sympa en dessert (ce fut celui du midi !) mais avec des Saint-Jacques ... j'ose à peine imaginer (et encore moins avec le vin). Donc, finalement, ce fut jus de mandarine réduit au sirop + beurre demi-sel + pâte de yuzu. Et ce fut très bien ainsi. Au milieu, ce sont des pommes reinettes poêlées au beurre, à la texture délicieusement fondante.
Les noix avaient une très belle taille : elles ont donc cuit un peu plus longuement que de coutume. Environ 1 minute par face (alors que souvent, c'est 30 secondes). Comme nous avions préparé un beurre clarifié pour le ris de veau qui suivait, il a servi aussi pour les noix, ce qui permet d'avoir une poêle très chaude.
Le midi, juste avant le repas, nous avions ouvert les bouteilles pour savoir si elles allaient bien se marier avec les plats. Le Riesling Schlossberg 2008 du domaine Weinbach s'avère beaucoup trop austère pour les Saint-Jacques – il irait beaucoup mieux sur un pavé de saumon légèrement fumé. Dieu merci, Stéphane a une cave bien remplie, et nous l'avons remplacé par un autre Riesling du même millésime: le Muenchberg d'André Ostertag. Celui plus rond, plus riche et marqué par les fruits exotiques, s'est marié à la perfection avec le plat.
Le ris de veau est à l'origine une recette de Chantal. Je l'ai un peu changée, car je suis incapable de suivre quelque chose à la lettre. Entre, j'ai changé la cuisson des légumes. Je trouvais bizarre de cuire ensemble les courgettes et les carottes, car leur texture/sructure n'ont rien à voir. J'ai fait cuire les courgettes dans un peu d'huile d'olive (quelques minutes, le temps qu'elles s'attendrissent tout en restant croquantes) alors que j'ai fait cuire les carottes dans de l'eau salée. Et quitte à utiliser de la mangue dans la sauce, j'ai ajouté aux deux légumes un peu de brunoise de la mangue qui apporte une texture soyeuse unique.
Dans la recette de Chantal, il n'y avait aucune indication sur la température du four. Tout s'est donc fait à la poêle, dans du beurre clarifié. Cela m'a permis d'obtenir une très belle croûte croustillante. Du coup, je trouvais dommage de la ramollir avec la sauce mandarine/mangue. Je l'ai donc versée sur les légumes (par contre, je n'ai pas assez salé... ce qui ne m'arrive pas souvent).
L'accord avec le Riesling Norheimer Kirschheck Riesling Spätlese 2007 de Dönnhoff était superbe, car il était à la fois rond et très "mangue", et en même temps, finement tranchant. Un pur moment de magie !
Même si la couleur rosée homogène pourrait faire croire à de la basse température, le magret de Canard de Barbarie a été cuit "à l'ancienne". Environ un quart d'heure côté peau, cinq minutes côté chair, cinq minutes côté peau, puis repos d'une vingtaine de minutes en papier alu). Par contre les panais ont été cuits au four (coupés en deux, légèrement graissés à la graisse de canard) et 30 mn à 200 °C. La sauce est à base de manchons de canard, de coulis de framboise, de jambon fumé, d'olive noire et de chocolat (si, si). Tout cela pour se marier avec ... une Côte Rôtie Côte Brune 2008 de Jamet. Un vin fin et élégant, avec beaucoup de fraîcheur, et des épices à la pelle, un fruit très pur. Une vraie gourmandise, qui là aussi, se mariait très bien avec le plat.
Le vin a été fini avec les fromages (tome de brebis et Saint-Nectaire). Mais comme ça faisait un peu court, une bouteille de Domaine de l'A 2005 a été ouverte pour compléter. Si ce vin se boit mieux qu'il y a 4 ans, il est encore un peu trop jeune à mon goût, mais toutefois bien agréable (avec des tanins denses mais bien fondus, un beau fruit et des notes d'élevage un chouïa trop présentes).
Bon, là, je n'ai presque pas innové cette recette de Chantal : des pommes en sabayon truffé (l'idée était de faire un mariage avec un vieux Sauternes). Deux changements tout de même : on a remplacé le pommeau par un jurançon moelleux lentement réduit en casserole dans lequel on a fait infuser des pelures de pommes (du jardin paternel) et un peu de truffe. Et, comme vous le voyez, j'ai passé la surface du sabayon au chalumeau.
Le Château les Justices 1970 était un peu fatigué, mais a retrouve un peu de sa forme avec le dessert. L'était temps de le boire, tout de même. La moitié de la bouteille de Jurançon restante était plus pétulante ;-)
Bilan : une super chouette soirée. On recommencera, je pense ;-)