750 grammes
Tous nos blogs cuisine Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
A boire et à manger
1 août 2021

Visite chez Follet-Ramillon

f00

Après avoir goûté trois de leurs cuvées il y a 7-8 mois, puis créé un repas autour de leurs différents vins, il ne me restait plus qu'une chose à faire : visiter le domaine Follet-Ramillon pour en savoir plus sur leurs méthodes de production. 

Le chai est bâti en brique monomur (brique alvéolée qui assure une bonne isolation). Au rez de chaussée, il y a le pressoir et les cuves de stabulation. Juste à côté, une pièce pour le dégorgement et l'habillage des bouteilles. Tout le reste est en sous-sol à 4.50 mètres de profondeur. Il n'y a pas eu besoin de creuser : ils ont profité d'un dénivelé naturel. 

f02

Le pressoir de 4 tonnes de contenance est pneumatique, comme cela se fait de plus en plus. La façon dont on s'en sert est plus importante que le type de pressoir lui-même. Ici, on aime prendre son temps. Ils font un première 'serre' de 40 mn, puis ils montent par palier très très doucement. Sur les trois premières presses, ils vont obtenir 20.5 hl de cuvée (maximum réglementaire).  Sur les deux dernières, ils vont avoir les tailles (taille 1 et taille 2). Souvent, les tailles 2 sont éliminées. Et même la taille 1 l'année dernière, les quotas ayant été atteints avec les cuvées.

f01

Les belons permettent de mesurer précisément le volume de jus des cuvées et tailles. 

Le jus est sulfité légèrement en sortie de pressoir. La quantité utilisée dépend du test de tenue à l'air. Puis les jus sont envoyés vers les cuves situées juste à côté pour un débourbage (statique à froid) de 18-24 h. Puis il est soutiré et dirigé vers les cuves en sous-sol. 

Les cépages et les différents terroirs ne sont pas mélangés dans le pressoir. Cela permet d'avoir des parcellaires de cépages, avec chacun sa personnalité. 

Il ya des volumes de cuve très différents, tous thermorégulés avec un drapeau (15-16 °C).  

En début de vendange, le domaine achète un paquet de levure champenoise sélectionnée (homologuée en Bio) qui va servir à faire un "pied de cuve" pour démarrer  la première fermentation. Au fil des jours, les nouvelles cuves seront ensemencées  avec le moût de la précédente, etc. Ils ont fait déjà fait plusieurs essais en ne servant que des levures indigènes, mais le résultat est moins régulier. Étant donné qu'ils sulfitent très peu, les jus sont sensibles à l'air au départ. Il est donc important que la fermentation démarre très vite (dans les 24 h). Dès qu'il y a dégagement de gaz carbonique, le moût est protégé. Ils aérent énormément durant la fermentation.  Plus ils le font, moins les vins sont sensibles à l'oxygène. Cela leur permet de ne pas sulfiter les vins de réserve (ce qui fait hurler le laboratoire  d'analyse !). Plus le sulfitage est faible, plus les levures produisent elles-même les sulfites dont elles ont besoin. Ils ont fait des essais : un sulfitage léger permet d'avoir un taux de SO2 total plus faible que s'ils ne sulfitent pas du tout. 

Une fois la fermentation achevée, les cuves sont abaissées à 12 °C , empêchant les malos de se déclencher (sans avoir besoin d'ajouter de SO2). Ils n'ont jamais eu de départ de malo en cuve. Par contre, en fût,  elle peut se déclencher car les températures ne sont pas aussi bien maîtrisées (au total, 90 % des vins ne font pas leur malo). 

S'ils utilisent des bactéries lactiques, elles apportent en fin de FML une aromatique lactique. Alors que si la malo se fait naturellement, cela ne se sent pas. On sent juste que c'est un peu plus rond à la dégustation. 

"Sur le secteur de Ville-Dommange  qui est sableux, il y a un décalage de maturité par rapport à la vallée de la Marne.  Pendant longtemps, nous vendangions ces parcelles une semaine avant les autres. Le problème, c'est qu'il faut trouver les vendangeurs pour ramasser 4000-6000 kg,  puis faire une coupure d'une semaine avant de rédémarrer.  Il y a quelques années, nous avons décidé d'attendre une semaine de plus pour vendanger ce secteur en même temps que les autres – tous les voisins avaient terminé de vendanger  depuis 5-6 jours.  Nous avons obtenu des moûts à 11.5 % potentiel. Nous avons baissé les températures et mis un peu de sulfite pour être sûr de ne pas faire les malos. Et nous avons été très satisfaits du résultat : les vins étaient complexes, matures. Nous les avons assemblés avec des vins qui avaient fait leur malo. Nous n'avons jamais rencontré de problèmes Désormais, c'est devenu la norme avec le réchauffement climatique : nous vendangeons tard et mûr, et nous  évitons la malo. Elle alourdit les vins, particulièrement ceux issus du meunier. Depuis que nous avons arrêté, les gens sont surpris de leur finesse lorsqu'ils les dégustent. "

f04

Les barriques sont posées sur un système oxoline. Ils permettent de remettre les lies fines en suspension sans oxyder les vins, mais aussi de nettoyer et soutirer sans avoir besoin de les compliquer. Les lies grossières restent au fond des barriques quand on les tourne. Les fûts restent toujours remplis : au moment des vendanges, ils le sont avec les moûts de l'année. Et quand les vinifs/élevages sont finis, ils sont remplacés par les vins de réserve (qui sont en cuve le reste du temps). Cela évite les problèmes d'étanchéité  et le développement de mauvais micro-organismes. 

Sur les cuvées de meunier qui ont un peu trop de couleur, ce qui peut être gênant pour certains, ils ajoutent un peu de  lies de chardonnay dans le lot teinté, et ça redevient doré au lieu de rosé. 

Les années où les quotas sont plus faibles, le domaine ramasse tout de même tous leur raisins : cela leur permet de faire des essais de vinification et d'élevage.  Quand c'est raté, ça part en distillerie, et puis voilà.  Ces expériences les font avancer dans leur démarche. 

Jusqu'à l'année dernière, ils faisaient des rosés d'assemblage (chardonnay  +  vin rouge maison) qui sont sur la finesse et l'élégance. En 2020, ils ont fait un rosé de saignée (100 % noirs) plus rond, plus complexe, plus vineux. Plus un rosé de repas que d'apéritif. 

f05

La première solera est en bouteille depuis l'année dernière (et commencera à être dégorgée en 2024). L'assemblage est proche de celui de la cuvée Terroirs (meunier majoritaire). Elle comprend environ  60  % du vin précédent, et on  lui ajoute % du nouveau millésime.  Le vin est  jaune pâle,   tout en rondeur, frais, avec une ère impression pureté et une finale saline. 

f06

La composition des vins de réserve est assez variable selon les années. Cela correspond souvent à l'assemblage de l'année. Mais ils peuvent être parfois monocépage si les circonstances s'y prêtent. .

Celui que l'on goûte : 50 % de l'année dernière + 2-3 années avant (environ 20 mg/l de SO 2 total). Le domaine s'attache à garder fraîcheur et finesse. Quand ils sulfitaient plus, ils avaient toujours de la réduction qui nécessitait de les aérer. Depuis qu'ils sulfitent moins, il n'y a plus de réduction,

Nous passons à deux vins de réserve en barriques. 

Le premier ressemble un peu à la solera, mais avec un peu plus de fraîcheur et de peps (je ne m'attendais pas à ce qu'un vin de réserve soit aussi frais). 

Le deuxième est plus ancien :  il présente plus de corps et de tension, sans acidité apparente (alors que la malo n'a pas été faite) avec une finale beaucoup plus longue et persistante. 

Sur les dernières années, il sont surpris d'avoir maintenant des vins sans la moindre dureté au bout d'un ou deux ans de bouteilles.  Les vins manquent encore de complexité et d'évolution  mais ils sont très abordables. 

Ils font aussi des essais de vins sans liqueur de dosage ni sulfites ajoutés, mais ce ne sera pas tout de suite sur le marché. Ils attendent pour avoir plus de recul sur leur évolution. Pour tout ce qu'ils entreprennent, ils s'accordent de prendre du temps. 

Le principal problème de la prise de mousse, c'est un taux trop élevé de sulfites. Mais ce n'est pas notre cas. Les autres facteurs sont la température à laquelle elle se fait, et la population de levures (nous utilisons la même souche que pour les vinifications). Nous essayons d'avoir une population pas trop élevée, car il n'y a qu'une quantité limitée de sucres à transformer. Si vous mettez des convives autour d'une table avec une  certaine quantité de choses à manger, plus ils seront nombreux, moins ils auront à manger. Il faut donc qu'il y ait peu de levures pour qu'elles se multiplient correctement et se renforcent (la nouvelle génération est adaptée au milieu) Nous avons un microscope pour observer leur évolution. On regarde la taille et la forme des levures. Quand il y a une population peu élevée au départ, les levures sont plus rondes et roses. 

Pas de collage, pas de filtration à part un filtre à cartouche pour éliminer des "voltigeurs. Il y eut une époque où les vins collés / filtrés à la robe éclatante étaient à la mode. Mais on se rend compte qu'avec le temps, ils sont moins complexes que les vins non filtrés. Les filtres magiques qui enlèvent les particules sans les arômes, ils n'existent pas. Nous nous contentons de faire des soutirages successifs en laissant le vin se reposer. C'est pour ça que nous ne faisons jamais de mise en bouteille avant fin avril, début mai. 

Pour l'embouteillage, ils font appel à un prestataire (qui est un ami d'enfance).  Pour l'élevage sur lattes (sans lattes), ils ont 4 caveaux de vieillissement. Tout est rangé en palette. Le remuage se fait avec un gyropalette. Il faut alors transférer les bouteilles dans des palettes spécifiques qui ont une moins grande contenance. 

"Pour choisir le dosage, nous faisons des dégustations : nature, 1 gramme, 1 gramme et demi, 2,  3. C'est souvent ma femme qui trouve le bon dosage. Elle dit qu'elle n'est pas bonne en dégustation, mais ce n'est pas vrai. Elle n'a pas forcément les termes pour mettre en face, mais elle fait de la cuisine depuis très longtemps et a un palais développé

Certains domaines ne sont pas assez attentifs par rapport aux liqueurs de dégorgement. Comme ils  mettent très peu de liqueur dans chaque bouteille, ils  ne se rendent pas compte que  l'impact est énorme. Il y a un domaine qui faisait sa liqueur une fois dans l'année, la conservait dans un fût sans la protéger (ni sulfites, ni ouillage). La liqueur s'est oxydée. Il commercialisait des vins assez jeunes , ce qui donnait un vin mordant avec des notes oxydatives, ce qui donnait un champagne totalement dissocié.  Nous utilisons un MCR bio le plus neutre possible qui apportera de la rondeur et souplesse. "

f09

On a acheté une  nouvelle étiqueteuse qui permet de coller un "tour de cou" qui maintient la collerette en place lorsque vous ouvrez la bouteille. Et c'est moins joli. Les grandes maisons ont des machines qui mettent un point de colle pour la maintenir. 

Pour le dégorgement, nous mettons les bouteilles dans le bac à glace (tête en bas). On les récupère à la sortie. Elle passe par un rince-col puis une dégorgeuse automatique.  C'est un bras qui vient décapsuler la bouteille. Le vin éjecté est aspiré par un compresseur. La dose de liqueur est ajoutée. Puis bouchage et muselage automatique. Suit un passage à la laveuse avec un balai qui frotte. À la sortie, il faut remuer la bouteille afin de bien répartir la liqueur dans la bouteille, car elle n'a pas la même densité que le vin. Puis les bouteilles sont rangées en palette.  Elles reposent au moins six mois avant d'être commercialisées. 

f10

Pour les bouchons, le domaine est passé en "technologique". Joël les avait testés il y a quelques années, mais à l'époque, il trouvait qu'ils "fermaient" les vins. Mais ils ont eu pas mal de problème d'étanchéité avec les bouchons en liège.  Donc, les technos sont plus satisfaisants, d'autant qu'aujourd'hui, les bouchonniers savent mieux gérer l'apport d'oxygène. Néanmoins, toutes les personnes qui ont goûté les vins du domaine savent qu'une ouverture à l'avance leur fait du bien !

Joël m'a proposé de déguster les différentes cuvées, mais j'ai poliment refusé. Je connais plutôt bien les vins du domaine, et j'ai encore pas mal de route à faire !

La visite s'est avérée passionnante : on sent que les choses ont beaucoup évolué ces dernières années. Cela aura forcément un impact sur le style des vins. J'ai hâte de découvrir  les 2019 et 2020 aux alentours aux alentours de 2030  ;-)

_________________________________

Champagne Follet-Ramillon

29 Grande Rue,  51480 Belval-sous-Chatillon

Téléphone : +33 (0)3 26 58 11 68    Mobile : +33 (0)6 45 75 45 18

Email : info@champagnefollet.com

 

f08

Commentaires
A boire et à manger
A boire et à manger

Quand deux passions se rejoignent pour n'en faire qu'une: la gastronomie
Voir le profil de Eric B sur le portail Canalblog

Visiteurs
Depuis la création 5 919 898
A boire et à manger
Pages
Newsletter
1 154 abonnés
Suivez-moi