750 grammes
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A boire et à manger
18 juin 2020

À la recherche des p'tites étoiles

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J'avais décalé ma semaine de travail d'une journée (dimanche -> jeudi) pour avoir le vendredi et le samedi pour préparer le repas du dimanche suivant. Le menu n'est pourtant pas à rallonge, mais il fourmille de plein de petits détails qui demandent du temps, beaucoup de temps. On me dira que je n'ai qu'à faire plus simple. Eh bien non, ce n'est pas envisageable si je veux embarquer mes invités dans un voyage sensoriel dont ils ressortent avec plein de petites étoiles dans les yeux. Il faut donc aller de surprise en surprise, avec des sensations inattendues, des mets et des vins qui se transcendent mutuellement, le tout dans un crescendo qui doit faire que vous ne regrettez pas le plat précédent. Pour ce repas, j'ai poussé le détail jusqu'à faire le pain –  des ciabattas aux graines –  et les pralines servies avec le café.  Faut ce qu'il faut...

Mes invités du jour étaient des membres du club oenophile de Saint-Yrieix que j'anime chaque mois depuis bientôt 8 ans.  Je ne les avais pas vu depuis le 12 mars et ils commençaient à me manquer.  Ce repas était l'occasion de les revoir et de leur faire découvrir mon univers culinaire. Allez, on embarque pour le voyage !... 

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J'avais fait plusieurs fois une entrée intitulée "toute l'Italie dans une assiette". J'ai poussé le curseur encore plus loin en miniaturisant le plat qui devient "toute l'Italie dans une boulette". On retrouve quasiment tous les ingrédients du plat d'origine en une seule bouchée, générant une cascade de saveurs qui ne semble plus pouvoir s'arrêter : courgette, basilic, tomate et aubergine séchées; olive verte et noire, parmesan, pignon de pin, anchois, jambon San Daniele, bresaola, origan... L'autre "boulette" est une tomate cerise (non cuite) enrobée d'un caramel croustillant recouvert de graines de sésame blond, de sésame noir,  de chanvre, et des noisettes grillées concassées. Ce qui est intéressant, c'est le contraste entre le juteux de la tomate et le croquant du caramel, le sucré de ce derrnier et le salé des graines. 

Une bulle aurait été difficile à accorder avec ces mises en bouche. J'ai donc servi un rosé Sous les micocouliers 2017 du Mas de la Séranne, contenant pas mal de mourvèdre et complété par du cinsault. Sa vinosité et ses notes épicées/corsées avaient le répondant nécessaire. 

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L'une de mes obsessions actuelles – plutôt tendance, il est vrai – est le travail sur les légumes  : leur donner le rôle principal dans un plat et faire totalement oublier l'absence de viande ou de poisson, finalement pas si incontournables que ça. 

Cette variation sur le champignon de Paris peut être considérée comme mon "plat signature". Elle est pour moi ce qui symbolise le mieux mon travail :  prendre un champignon à 4.50  € le kg et le rendre aussi excitant qu'une morille ou une truffe. Il faut pour cela extraire tout en douceur, puis réduire, sécher, filtrer, et refiltrer. Il est nécessaire de s'y prendre deux jours à l'avance, mais cela en vaut vraiment la peine. C'était la 4ème fois que je le faisais, et je suis toujours autant émerveillé du résultat final (la recette est entièrement expliquée ICI). Il y a de l'onctueux, du moelleux, du croustillant, du croquant, du grillé, de l'acide... avec un étonnement à chaque bouchée. 

L'idéal, c'est un vieux Chablis qui "mousseronne". Mais bon, je n'en ai pas tant que ça en stock. J'ai donc servi un vin blanx arménien : Voskehat 2012 d'Armas Estate. Il "mousseronne" comme un Chablis, avec des notes de citron confit, de miel et de sous-bois d'automne. La bouche allie rondeur et fraîcheur, avec une grande douceur tactile (comme l'espuma de champignon, tiens). L'accord avec le plat est superbe.  

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Ce vrai-faux risotto au fenouil peut aussi être considéré comme un "plat signature" si ce n'est qu'il ne cesse d'évoluer avec le temps. Nous en sommes à la version n°4 qui diffère en deux points avec les précédentes :

Il n'y a carrément plus du tout de riz dans la recette : la crème qui enrobe les "grains" de fenouil n'est composée que de fenouil, de lait et de crème liquide.  

Une glace fait son apparition, créant un chaud-froid intéressant  : c'est une crème glacée (lait/crème/jaunes d'oeuf) parfumée aux graines de fenouil torréfiées. 

J'ai ressorti un vin qui m'avait enthousiasmé il y a cinq ans. J'en avais mis quelques unes de côté : c'est un Côtes de Provence Nowatt 2012 de Dupéré-Barrera (Rolle et Ugni blanc). On retrouve la grande tension qu'il avait dans sa jeunesse, mais dans un style plus évanescent. Le vin s'est épuré en gardant sa trame minérale. Le plat fait ressortir ses notes naturelles anisées. On retrouve aussi de la fleur de tilleul et du zeste d'agrume. L'accord avec le plat est parfait. 

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J'aurais pu continuer avec un plat autour du chou-fleur, de la carotte ou de la pomme de terre, mais je me suis dit que tout de même, il fallait passer un moment aux choses sérieuses avec cet agneau en trois cuissons : Les côtelettes cuites rosées, la poitrine aux épices cuite 45 heures (sic) à 75 °C puis passée sous le grill, et l'épaule (dans le rouleau) cuite 7 h à 120 °C. Au centre, une courgette de nice dorée et fondante. 

J'ai découvert le vin en même temps que mes invités. Je n'en avais acheté qu'une bouteille par curiosité chez un caviste bordelais : c'est un Nebbbiolo 2013 de La Cetto (Mexique). J'avais goûté plusieurs fois leur petite syrah qui est assez spectaculaire dans son genre (sans être trop à mon goût) mais le cépage italien m'intriguait. Je n'ai pas été déçu : on a bien le fruit intense et la fraîcheur du nebbiolo, tout en ayant une matière plus mure et concentrée. Jeune, le bois devait être bien présent, mais avec le temps il s'est bien fondu. L'ensemble est vraiment cohérent et n'a que peu d'équivalent dans le monde du vin (je ne veux pas dire que c'est le meilleur, mais que je ne connais aucun vin qui lui ressemble). Il allait aussi bien avec la côtelette rosée que  la poitrine longuement confite.

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Cela fait plusieurs années que j'ai arrêté le plateau de fromages – trop compliqué en terme d'accords – pour le remplacer par un "hybride" qui tient autant du fromage que du dessert. Cela permet de faire une transition en douceur entre salé et sucré, le plat conjuguant (sans excès) les deux. Cette fois, j'ai marié un sorbet aux poires (maison, très peu sucré) avec de la fourme d'Ambert que l'on retrouve aussi en émulsion dans le cornet. 

Je les ai mariés avec un Vouvray moelleux 1997 du domaine Freslier qui est relativement peu sucré et très frais, sur une aromatique de coing confit et d'écorce d'orange. Il n'écrasait pas du tout les différents éléments du plat tout en apportant un joli contrepoint sucré/acide au salé/gras du fromage et de l'émulsion.     

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Pour finir, un dessert autour de l'abricot et de la pistache. Comme il était difficile de trouver des abricots qui n'ont pas la dureté de balles de golf, je me suis rabattu sur des abricots secs que j'ai réhydratés avec du nectar d'abricot et du jus d'agrumes. La recette du gâteau à la pistache, à l'huile d'olive et aux agrumes est disponible ICI. La glace ultra-moelleuse à la pistache qui a fondu à vitesse grand V est à base de lait concentré sucré (ça ne fait pas de cristaux, mais ça ne tient pas au chaud...).

Je l'ai accompagné avec un Monbazillac cuvée Madame 2004 du château Tirecul la Gravière.  C'est un millésime plutôt faible pour cette cuvée, mais il est tout de même plus concentrée que 99 % des Sauternes des meilleures années.  L'intensité et l'onctuosité en bouche sont assez impressionnantes tout en étant équilibrées par une belle acidité. Comme l'aromatique est très marmelade d'abricot et agrumes confits, cela matche très bien avec le dessert. 

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La photo est de l'année dernière, mais j'ai refait des "capsules nespresso", fourrées à la ganache au café (donc juste la version "noire". Mais j'ai encore du chocolat Ruby pour faire des roses...). 

"Un feu d'artifices de saveurs" a dit Patrick. "Un émerveillement des papilles" a ajouté Claudine. Qu'écrire de plus, à part mission remplie :-)  

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Commentaires
D
Pour moi ,à voir ces photos c’est plutôt des grosses étoiles que je donnerais 😀👍<br /> <br /> ´
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Quand deux passions se rejoignent pour n'en faire qu'une: la gastronomie
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