Quatre journées peu ordinaires (jour 4) : Champ des Soeurs au Champ des Treilles
Mon ami Laurent Maynadier, producteur à Fitou, m'avait confié des bouteilles issues de ses expérimentations d'élevage de six mois en immersion : d'une part dans le Lac de Servières dans le massif central à 1200 m d'altitude (voir ICI), d'autre part dans la mer à 20 mètres de profondeur au large de Gruissan (voir LÀ)
Sur notre forum favori où nous écrivons tous, Jean-Michel Comme s'était montré sceptique sur l'expérience de Laurent. Je trouvais donc intéressant de les déguster avec lui et sa femme Corinne afin de nous faire une idée précise de la chose...
Corbières 2011 "normal" : nez assez discret, sur des notes citronnées. Bouche ronde, fraiche, avec un côté croquant, gourmand. En se réchauffant, il donne une sensation de légère dilution (ou alors, c'est dû au fait que j'ai bu les deux autres bouteilles entre temps... à ne pas exclure)
Corbières 2011 "Lac de Servières" : nez plus ouvert, plus expressif, avec un côté dessert au citron (plus crémeux et "sucré" ). La bouche est beaucoup plus tendue, avec une acidité marquée et un côté strict évoquant un jeune Chablis en année froide. Un peu austère.
Corbières 2011 "Mer" : nez plus fin et concentré, avec des notes marines/minérales. Bouche beaucoup plus ample, avec une matière paraissant plus riche, opulente, une acidité pure, ciselée, équilibrant superbement l'ensemble. Finale plus marquée, avec une mâche "calcaire" et une fine amertume d'agrume. Un très beau vin, sans conteste le meilleur des trois.
Fitou la Tina 2010 "normal" : nez sur les fruits noirs bien mûr, les épices, la réglisse. Bouche de belle ampleur, avec une matière dense et mûre, gourmande, avec des tannins déjà bien fondus, le tout restant bien équilibré. Déjà bien bon !
Fitou la Tina 2010 "Lac de Servières" : nez assez proche, avec peut-être l'élevage qui ressort un peu plus. La bouche par contre est beaucoup plus serrée, avec des tannins plus durs, offrant peu de plaisir.
Fitou la Tina 2010 "Mer" : nez le plus élégant des trois bouteilles, évoquant presque plus un parfum qu'un vin. La bouche est hélas la plus décevante, avec une amertume très prononcée qui rend le vin désagréable. La finale a encore une amertume plus prononcée. Vraiment pas bon.
Conclusion : l'immersion dans le lac semble figer les choses plus que les transformer. On a l'impression de boire des vins trop jeunes à qui un élevage "normal" fera du bien. Je n'en vois donc pas trop l'intérêt puisqu'ils s'avèrent moins prêts que les vins classiques alors qu'ils ont nécessité une grosse logistique pour arriver à ce résultat. De nouvelles bouteilles viennent d'être immergée dans le même lac... À quoi bon ?
Par contre, la mer apporte une véritable modification, en bien ou en mal : en bien pour le blanc qui est carrément transcendé. En mal pour le rouge qui est à mon sens "massacré" par l'expérience.