03 juin 2006
L'empereur d'Alsace décliné en 16 vins (+1)
Si pour beaucoup le gewürtztraminer est le roi d'Alsace, le Riesling en est assurément l'empereur! Ce cépage n'est pas reconnu à sa juste valeur car lorsqu'il est mal travaillé (et ça doit representer les 3/4 de la production), on obtient un vin acide sans intérêt. Mais lorsqu'il est récolté à maturité (voire en surmaturité) sur un bon terroir, il peut atteindre des sommets inégalés!
L'autre intérêt de ce cépage, c'est qu'il est un véritable révélateur de terroir. Selon qu'il pousse sur du du granit, du calcaire ou du schistes, sa stucture et ses arômes se modifient de façon incroyable. Par sa constitution géologique, l'Alsace offre une palette de terroir inégalée dans le monde. Ainsi, une dégustation variée de riesling représentatifs de leur cru permet de ressentir
Source: Claude SITTLER
C'est ce qu'a voulu nous montrer Thierry Meyer de l'Oenothèque Alsace à travers la dégustation des "terroirs alsaciens révélés par le riesling": 8 paires de riesling présentant des caractéristiques antagonistes, chaque paire étant elle-même très différente des autres par son degré de maturité, son ancienneté, etc... Autant dire un programme passionnant
1 - Riesling "générique" (coopérative/producteur indépendant)
Rebgarten 2004, coopérative de Bestheim: robe très pâle. Nez sur le citron et la verveine. Bouche vive, de moyenne ampleur sur des saveurs citronnées. Bonne persistance sur des notes salées. Pas mal **(*)
Riesling 2004, Boxler: robe un peu moins pâle. Nez sur l'anis, fleurs blanches et agrumes. Bouche plus ample, avec de la fraîcheur (léger gaz). Matière plus concentrée. Finale minérale persistante avec un peu d'amertume. ***
2 - Riesling grands crus sur deux sols différents (marno-calcaro-gréseux/schistes)
Hengst 03, Barmes-Buecher: or pâle. Nez sur le citron confit, la mirabelle et des notes terpéniques. Bouche ample, grasse, présence de sucre résiduel mais bien équilibré par l'acidité. Notes terpéniques marquées. Sensation de picotement en fin de bouche. ***(*)
Kastelberg 03, Guy Wach: robe idem. Nez plus discret sur le citron, le poivre, les herbes aromatique et une pointe de fumée. Attaque plus ronde, puis montée progressive d'une (belle) acidité jusqu'à la finale, marquée par l'amertume ****
Les deux paires suivantes présentent les mêmes crus (Schlossberg -granitique - et Furstentum - calcaire). La première est faite par une coop, l'autre par un vigneron.
3 - Schlossberg/Furstentum par la coop de Kientzheim-Kaysersberg
Schlossberg 02: robe or pâle. Nez confit et terpénique. Bouche mélangeant douceur et acidité. Cette dernière s'estompe en final. **
Furstentum 01: robe idem. Nez pas net. Début de bouche presque aqueux, puis montée progressive de l'acidité jusqu' à une finale franchement acide. *
4 - Schlossberg/Furstentum par Paul Blanck
Furstentum 02: nez confit, mûr (pomelos, pin). Bouche ronde, légèrement sucré, l'acidité discrète au début est de plus en plus marquée. **(*)
Schlossberg 02: nez plus discret. Attaque vive, puis le vin s'éteint doucement. **
Conclusion: sur les terroirs calcaires, l'acidité va croissant, sur les granitiques, l'attaque est plus immédiate puis s'éteint doucement.
5 - rieslings plus évolués sur deux terroirs différents (Marno-sablo-gypseux/marno-calcaire)
Schoenenbourg 98 "hommage à Jean Hugel", Hugel: robe dorée dense (larmes). Nez confit: thérébentine, fumée, épices, raisin sec. Bouche grasse, confite, marquée par la minéralité. Bel équilibre. Jolie finale. Bien. ****
Moenchberg 98 VT, Guy Wach: robe idem. Nez sur le citron confit, l'iode et le poivre. Bouche élégante, ronde, avec une bel équilibre sucre/acidité. Grande persistance. ***(*)
Les deux paires suivantes présentent les deux mêmes producteurs sur les deux mêmes terroirs à 8 ans d'intervalle.
6- Riesling 99 sur deux terroirs différents: Zinkoepfle (calcaro-gréseux) et Kitterle (gréso-volcanique)
Zinnkoepfle 99, Seppi Landmann: nez fumé, poivré avec des notes de fleurs blanches. Le début est un peu mou, puis l'acidité va croissant. Amertume en finale. Y a pas, c'est un calcaire! ***
Kitterle 99, Schlumberger: nez sur le caramel, les fruits blancs mûrs, la pomme cuite et les agrumes confits. Attaque vive, puis bouche plus ronde avec une jolie matière. Grande persistance. ****
7- Riesling 91 sur deux terroirs différents: Zinkoepfle (calcaro-gréseux) et Kitterle (gréso-volcanique)
Zinnkoepfle 91, Seppi Landmann: robe dorée. Nez résineux, confit, avec des notes de praliné et de pommes vertes. Bouche ronde, puis apparition de l'acidité jusqu'à la finale: calcaire! Grande persistance ***(*)
Kitterle 91, Schlumberger: robe or vert. Nez réduit au départ sur des notes peu agréables: gaz, mercaptan. Se dissipe ultérieurement. Bouche au départ inexistante, puis la matière apparait progressivement. La bouche s'achève sur des notes minérales marquées. ***(*)
8 - Bouquet final: deux grands rieslings de 2004 sur des terroirs différents: Schlossberg (granitique) et Muenchberg (gréso-volcanique)
Schlossberg 04 "cuvée catherine", domaine Weinbach: robe dorée. Nez délicat sur la framboise et la rose. Bouche finement acidulée, d'une grande élégance, avec une montée en puissance de la matière. Grande finale. ****
Muenchberg 04, André Ostertag: robe dorée. Nez fin, floral, pêche , abricot, agrumes. Bouche au départ ronde, fine, classieuse. Progressivement, la matière se met en place, et ça devient hénaurme. Finale superbe ****(*) . Sera à 5* voire 6* dans 15-20 ans.
J'ai apporté un vin supplémentaire pour conclure cette dégustation instructive. Sans l'avoir prémédité, il y avait eu précédemment le même cru dans la même année. Nos dégustateurs allaient-ils le reconnaître?
Robe or cuivré. Nez confit sur des notes terpéniques, l'écorce d'orange et la fumée. Bouche ample, ronde, soyeuse, superbe équilibre sucre /acidité. Grande et longue finale. *****. Alors?
C'est un Riesling 98 VT récolté sur le Schoenenbourg (sans en avoir l'appellation) par Dopff au Moulin. Certains ont reconnu de suite, d'autres non (je ne dénoncerai personne...).
Ce fut en tout cas très instructif. Encore un bien beau moment des REncontres VEndéennes.