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A boire et à manger
12 octobre 2016

Mémorable repas-dégustation à Bourges

C'est vrai que j'enchaîne les rencontres en ce moment, mais je ne vais pas m'en plaindre. Huit jours après Toulouse, j'étais à Bourges pour fêter les 60 ans de Jean-Loup en compagnie d'une dizaine de membres du forum LPV. Comme le veut la coutume, cela se passe dans la cave, les vins étant accompagnés de mini-plats concoctés par Nicole.

Cette fois-ci, il y a un thème : que des millésimes se terminant par 6 (parce que Jean-Loup est né en 1956 et qu'il a 6 X 10 ans)

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Avec les incontournables galettes de pomme de terre, nous commençons évidemment par un vin effervescent. Sa robe est dorée, avec de fines bulles en cordon. Le nez est intense et complexe, démarrant sur des notes grillées, puis sur les fruits secs, les agrumes confits, le safran... La bouche est tendue par une acidité fine mais inflexible – signature du millésime 1996 – heureusement enrobée par une matière dense, vineuse, et égayée par des bulles ultra-fines mais toniques. La longue finale est d'une puissance aromatique impressionnante, majestueuse, oserai-je dire, avec tout le panel des notes perçues au nez. On n'est pas loin de la quasi-mythique queue de paon. Un superbe champagne qui s'avère être Cristal 1996 de Roederer. De loin le meilleur que j'aie jamais bu, car les autres "Cristaux" ne m'avaient pas laissé un souvenir impérissable...

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Nous démarrons alors une série de quatre vins blancs secs. Le premier est servi avec une tranche de foie gras poêlé rehaussé de vinaigre balsamique. La robe est plutôt pâle, sans signe d'évolution. Le nez est d'abord à fond sur le cassis (bourgeon, fruit, bonbon) au point d'en être dérangeant, avant de partir ensuite sur les fruits exotiques et des notes florales (rose). Dès l'attaque, on est happé par une acidité ciselée très intense, contrebalancée par une matière ronde et riche, limite onctueuse. Cette émouvante opposition se poursuit en finale, à la fois tendre et exotique (avec quelques sucres résiduels) et tranchante/tonique. Un vin magnifique qui laisse sans voix. À peu près tout le monde part sur une cuvée spéciale de Cotat ... et sur le millésime 1996. Bingo pour les deux : c'est bien un Sancerre Les Culs de Beaujeu Cuvée Spéciale 1996 de François Cotat

À noter que l'accord avec le foie gras fonctionne superbement. C'est tellement plus enthousiasmant que l'éternel Sauternes...

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Le second vin blanc est servi avec du homard rôti au beurre vanillé. La robe est  couleur paille. Le nez est expressif, sur le raisin bien mûr, l'abricot confit, et des notes fumées/grillées. Le vin ayant été servi bien frais, il parait d'abord très dense, plutôt monolitique, mais l'on sent en arrière-plan une belle énergie qui ne demande qu'à émerger. Avec le réchauffement, il prend de l'ampleur, du gras, élargit sa palette aromatique. La finale puissante est peu chaude (alcool) et encore marquée par l'élevage (beurre, vanille, pain toasté). On sent que le vin n'a pas encore délivré tout son potentiel. Mais on peut se demander si cette légère surmaturation sera digérée un jour. Avant que l'on sache ce que c'était, le vin divisait les convives. Une fois que nous l'avons su, ça ne s'est pas arrangé : c'est un Bâtard-Montrachet Grand Cru 2006 du domaine Leflaive.

L'accord avec le homard vanillé était tip-top !

 

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Le clafouti aux morilles a accompagné les deux derniers blancs. Le premier a un robe d'un or dense. Le nez est fin et profond, sur les agrumes, les fruits blancs (poire), avec une pointe d'encaustique et de grillé. La bouche est d'abord tendue, précise, minérale, très "eau de roche", puis en se réchauffant gagne en ampleur et en densité sans perdre de sa tension. La finale est longue et intense, avec une belle mâche crayeuse soulignée par des notes grillées. Un vin superbe qui en a encore sous la pédale : c'est un Saumur Brézé 2006 du Clos Rougeard.

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Le second a une robe beaucoup plus évoluée, presque cuivrée. Le nez fait lui aussi évolué, sur des notes d'encaustique, de noix, de champignon, et même de curry. La bouche est ample tout en étant très intrusive, vous immergeant totalement dans son aromatique oxydative. La finale est savoureuse, très marquée par la noix et les épices. Perso, je suis habitué à boire des vins oxydatifs de toutes régions et cépages. Il m'a donc plutôt bien plu. Mais il a laissé d'autres perplexes. Nous l'avons ensuite regoûté avec le comté sur lequel il était plus à l'aise (et un peu plus chaud et aéré). C'est Oro 1996 du domaine Peyre-Rose (Marlène Soria).

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Nous passons ensuite aux vins rouges 

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avec d'abord une terrine de sanglier

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Le premier a une robe grenat translucide, très peu marquée par l'évolution. Le nez est frais, tonique, sur des notes de fruits rouges et noirs (framboise, cerise, cassis), avec une touche de sous-bois automnal. La bouche est ronde, soyeuse, avec une tension et une énergie enthousiasmantes, et plus encore un fruit frais et gourmand (cassis, surtout). Le tout réussissant à avoir la classe d'un beau Bourgogne même s'il semble venir d'ailleurs. La finale légèrement boisée poursuit dans l'élégance. Un excellent vin que pas mal situent en Loire, et ils ont raison : Saumur Champigny Poyeux 2006 du Clos Rougeard.

Il y a eu un échange assez soutenu sur le rapport qualité/prix de cette cuvée. Au prix propriété (environ 35 €), il est irréprochable, voire très bon. A près de 200 € dans des millésimes récents, ça frôle le délire... 

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Nous buvons le second vin rouge avec des tartelettes aux champignons, jambon cru et aubergine truffée. Sa robe est beaucoup plus sombre. Le nez fait très médocain dans un premier temps – cassis, cèdre, tabac – puis prend des accents plus sudistes avec du cuir et de la tapenade. La bouche, fraîche et classieuse, est presque trop fine et soyeuse pour un Médoc, souvent plus denses et virils. La finale est très belle, avec une mâche fine et intense sur les notes perçues au nez. Excellent vin ! Après avoir tourné pas mal, certains finissent par atterrir en Provence : c'est un Bandol 1996 du Château de Pibarnon.

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L'accord avec la tartelette est absolument délicieux !

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Le troisième vin est accompagné par du lapin à la tapenade et tomates confites. Sa robe est très sombre. Le nez est absolument magnifique, sur la liqueur de fruits noirs, la violette, avec pointe de lard fumé, de musc,...  On passerait des heures à le respirer. La bouche est tout aussi envoûtante, par sa texture sensuelle, son énergie, sa profondeur, son aromatique puissante et complexe...   La jouissive finale ne met non seulement pas en péril le magnifique édifice, mais au contraire le renforce. Très grand vin, assurément. Plusieurs partent sur une "La La La"*, certainement de 2006. C'est est bien une : Côte Rôtie La Turque 2006 de E. Guigal. Au niveau du mythe !

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L'accord avec le lapin est extra 

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J'avoue m'être demandé ce que pouvaient être ces petits poivrons en forme de goutelettes qui acompagnaient ce wok de boeuf. C'est quasi tout nouveau. On appelle cela des gouttes de poivron. Cette variété dénichée en Amazonie a le goût et la douceur du poivron, et n'a pas besoin d'être épluchée ou épépinée. On ne le trouve apparemment qu'en conserve. Mais venons au vin qui accompagne le plat : la robe est encore jeune. Le nez fait très médocain, avec ses notes de cèdre et de Havane. Il y aussi du cassis, et un peu de sous-bois. La bouche trace droit avec une grande vigueur et une belle sensation de fraîcheur. La matière est dense, fruitée, polie par le temps. L'ensemble est harmonieux, très réussi, mais le vin aurait clairement gagné à être servi avant la Turque, car il paraît pour le moins austère. Il n'empêche que ce Château Margaux 1986 semble beaucoup plus jeune et harmonieux que celui que j'ai bu l'été dernier en Belgique. Mais cela peut être aussi une question de contexte. 

L'accord avec le boeuf aux poivrons est impeccable !

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Avec des comtés de trois âges différents (7, 12 et 20 mois), nous repassons au vin blanc. Enfin blanc, pas vraiment. La robe est d'un jaune doré très intense. Le nez est juste magnifique, ne ressemblant en rien à ce que j'ai déjà senti. Nous ne sommes pas sur la noix habituelles des vins jaunes, mais sur la liqueur de noix, complétée par moultes épices, des notes pâtissières (crème brûlée) et même de fleurs séchées. La bouche n'est pas aussi moelleuse que le nez pourrait laisser imaginer, mais elle est hors norme par sa douceur (en terme de toucher) et son intensité. Le "goût de jaune" est quasiment absent, remplacé par des notes de caramel au beurre, de gâteaux aux fruits secs. La finale est d'une rare intensité, sans la moindre dureté/agressivité, sur des notes de noix confites, avec une légère sensation de sucres résiduels. Magique ! Mon plus beau jaune jamais bu : c'est un Château Chalon "vigne aux dames" 1976 de Marius Peyron

Nous avons alors regoûté l'Oro. Il était mieux que précédemment, mais après cette merveille, c'était tout de même un peur dur...

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À un moment, il faut bien arriver au dessert même si cela sonne la fin du repas. C'est une poire gratinée au pralin, accompagnée de macarons aux amandes (des vrais, pas les machins colorés aux parfums improbables). Avec évidemment un liquoreux : sa robe est d'un doré intense. Le nez est très expressif, sur la mandarine confite, le fruit de lapassion, l'ananas rôti légèrement vanillé. La bouche est ample, soyeuse, d'une grande harmonie, avec une liqueur bien présente mais pas lourde, le tout étiré par une fine acidité. La finale est généreuse, avec un retour de la mandarine et de notes rôties, avec un sucre plutôt discret. Cela peut encore vieillir, mais c'est déjà très très bon. Il s'agit du de Château Climens (Barsac) 2006.

L'accord me semble plus réussi sur les macarons que sur la poire, plus discrète aromatiquement. 

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Merci à Nicole et Jean-Loup pour ce grand moment de gastronomie !

 

___________________

* les trois grandes cuvées de Guigal : la Turque, la Landonne et la Mouline.

 

 

 

Commentaires
J
Bonjour,<br /> <br /> Puis je savoir où s'est déroulée cette dégustation ? <br /> <br /> Le forum LPV est actuellement H/S et je n'arrive pas à trouver cette fameuse cave tenue par Jean loup et Nicole. <br /> <br /> Merci.
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M
Moi aussi, j'aimerais bien avoir la recette du clafoutis aux morilles et aussi, un verre de Château-Chalon.... pour accompagner les truffes qui vont bientôt arriver...
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D
Oh là claque ,quels flacons.Ici une dame aimerait avoir la recette du clafoutis aux morilles.
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P
Bravo à Nicole.<br /> <br /> La parade est parfaitement décrite par l'écrivain.<br /> <br /> La tradition Française enviée par le monde entier, est présentée ici comme j'aime!
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L
Quel magnifique repas - dégustation !
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Quand deux passions se rejoignent pour n'en faire qu'une: la gastronomie
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