750 grammes
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A boire et à manger
2 janvier 2022

L'année finit en beauté

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J'ai fait le réveillon du 31 décembre chez des amis amateurs de vins. Nous n'étions que six au total, pemettant d'apprécier chaque bouteille qui a été servie. J'avais été chargé d'amener quelques bouteilles pour accompagner l'apéro, l'entrée et le dessert. Mes amis connaissant ma passion pour la transition salé / sucré, ils m'ont également demandé de réfléchir à une assiette autour du fromage. J'ai évidemment relevé le défi avec plaisir. 

Vers 20 h, nous avons démarré avec des toasts à la galantine de chevreuil, avec un tout petit peu de gelée de coing, donnant une intéressante touche allemande

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J'ai amené un Champagne Sainte-Anne de Chartogne-Taillet. (base 2016, dégorgement 2019). La robe est or clair et les bulles ne sont pas exubérantes. Le nez est fin, sur les fruits blancs mûrs, la noisette, le mousseron. La fine acidité qui vous saisit dès l'attaque et ne vous lâche plus laisse imaginer qu'il y a deux ans, le vin devait être tonique et rafraîchissant. Mais depuis, le vin a évolué, polissant et arrondissant la matière, affiné les bulles, tertiarisé l'aromatique, donnant au final un vin "à point", plutôt zen dans l'esprit, avec cette acidité qui apporte une juste tension. Mais l'on sent qu'il ne deviendra jamais très complexe – il n'a pas été conçu pour ça – et ne gagnera pas à viellir davantage. La finale finement crayeuse, entre pomme et sous-bois automnal, pas très persistante, confirme mes impressions. Faut pas que j'attende des années avant d'ouvrir la bouteille qu'il me reste en cave. 

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Les dés de gouda à la truffe (enfin, aromatisé à la truffe) se marient bien avec le deuxième Champ' amené par Stéphane. 

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C'est une cuvée Confidentielle de Dehours ... achetée il y a un peu plus de 10 ans à Cave privée. De ce que je lis sur mon smartphone, c'est un moitié Chardonnay / moitié Meunier, elevés partiellement en fûts. La prise de mousse s'est faite avec une dose réduite de sucres afin d'avoir une pression moins forte et des bulles plus fines. La robe est très pâle pour un "vieux" champagne, et les bules peu présentes. Le nez est discret, sur la pomme chaude, le miel et une pointe de truffe. La bouche est élancée, aérienne, avec une matière élégante, délicate, et un fin perlant qui la souligne. L'aromatique est également délicate, avec toujours cette touche truffée. La finale poursuit la dynamique de la bouche sans la moindre rupture, avec une intensification des sensations, sans que le vin ne se durcisse, sur les fruits secs légèrement truffés. Le vin est loin d'être mort, mais comme le vin précédent, il est temps de le boire. 

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L'entrée s'appelle mystérieusement : Stevenson / l'île au trésor. Notre hôte, écrivain à ses heures, a donné en effet un nom de livre ou d'écrivain à chacun des plats qu'il a préparés. L'île, c'est le massif de langouste des Caraïbes  qui trône au milieu de l'assiette entourée d'une plage de flocons d'avoine et de noisettes  torréfiés. La mer, ça va être un jus de mangue concentré que l'on verse dans l'assiette, ainsi  qu'un shot de jus de bergamote et d'huile d'olive. Original et très bon. 

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J'ai amené un Riesling GG Wehlener Sonnenuhr Alte Reben 2017 du Dr Loosen. Le nez est dominé par l'ananas frais, tonifié par le citron vert. La bouche est longiligne, portée par une grande tension évoquant un katana qui siffle dans l'air. La matière est plus gazeuse que liquide, déposant un voile de fraîcheur vivifiante, sur des notes d'agrumes et de fruit de la passion, renforcée par un léger perlant. En finale, la lame du katana vous achève, avec des notes citriques / acidulées, l'ananas qui fait son retour, et le fruit de la passion qui persiste longuement ( et le citron vert qui crépite).  Alors que j'avais peu d'éléments au départ pour déterminer quel vin amener, je suis heureux de mon choix qui plaît beaucoup aux convives. 

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Le plat suivant s'appelle Paul Valéry. "Ca ressemble à la soupe VGE", lâchai-je. Normal, puis que c'est une revisite du plat de Paul Bocuse dédié à Valéry Giscard d'Estaing. Il y a dans cette version un peu plus de légumes et un peu moins de truffe, et le bouillon n'est pas celui d'une volaille en demi-deuil (la volaille est ici carrément morte). Par contre, l'instruction est la même que celle que donna Bocuse à Giscard en 1976 : il faut casser la croûte !

Je n'ai jamais eu l'occasion de goûter la version originale, mais celle-ci est très réussie. La truffe est bien là, sans être omniprésente, laissant les autres ingrédients s'exprimer; 

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Stéphane a amené un Arbois Les Bruyères 2010 de Stéphane Tissot. La robe est d'un beau doré. Le nez est intense, sur le sésame grillé, le pétard du 31 décembre, la noisette torréfiée et une fine touche de tourbe. La bouche est élancée, tendue par une fine acidité, tout en déployant une matière douce, caressante, d'une grande fraîcheur aromatique, avec toujours ces notes grillées / torréfiées très présentes. La finale monte de deux crans tous les paramètres, avec la noisette qui dispute la vedette au sésame. Et c'est finalement ce dernier qui l'emporte.  Le vin est probablement un peu trop puissant pour la soupe, mais pour peu qu'on décale alternativement la consommation de l'un et de l'autre de quelques secondes, ça se passe très bien. 

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Puis arrive "Edmond Rostand", auteur de Chantecler et de Cyrano, dont le deuxième acte démarre dans la Rôtisserie des poètes.

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Le chapon a été laqué au jus d'orange durant sa cuisson. Il est accompagné d'une réduction de jus de clémentin et de chips de potimarron  (provenant du jardin du père de David). 

Il est accompagné d'un Sauternes 1975 du Château les Justices (même propriétaire que Gilette). Stéphane nous en avait déjà fait goûter une il y a un peu plus d'un an. Même si à l'ouverture, le bouchon est parti en mille morceaux, celui-ci a bien fait son travail : il fait beaucoup plus jeune que le précédent, avec quasiment pas de notes safranées / truffées. On est essentiellement sur l'agrume confit (orange, mandarine, kumquat) et l'abricot sec. La bouche est tonique et généreuse pour un vin de 46 ans, avec une matière concentrée et onctueuse contrebalancée par une grande fraîcheur. La finale est encore plus tonique et généreuse, la fraîcheur plus intense, avec les nobles amers de l'écorce d'orange et du kumquat qui équilibrent les sucres résiduels. L'accord fonctionne très bien.. 

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Et voici ma contribution au repas : un livarot saupoudré de sucre roux de canne passé à la flamme sur un lit de spéculoos, une glace au pain d'épices et à l'orange confite, une tuile au spéculoos et au yuzu, et entre les deux, la réduction clémentine  / passion que j'avais servie la semaine dernière avec mes rouleaux de printemps. Même si j'avais forcément imaginé que tout irait bien ensemble – sinon, je ne l'aurais pas fait – j'ai été bluffé par le résultat. Je ne pensais pas qu'il était si facile de passer d'une glace sucrée à un fromage très typé. Non seulement c'est aisé, mais c'est absolument délicieux !

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Ce plat a été imaginé pour ce Riesling Ürziger Würzgarten Auslese*** de Karl Erbes. (un cadeau de mon ami Didier K que je remercie). La robe dense fait penser à de l'or en fusion. Le nez est intense mais fin, sur le yuzu confit, le terpène d'agrume, le gingembre confit et une touche d'encaustique. Le vin trace  et file droit en bouche dès l'attaque sans que l'acidité ne soit perceptible, délivrant une matière onctueuse, tapissante, étonnamment grasse pour un Riesling, sur un mélange d'agrumes confits, de pain d'épices et de beurre noisette. Elle s'élargit progressivement avant d'offrir une finale superbe, encore beaucoup plus concentrée que la bouche, dotée d'amers à faire pleurer ta mère (d'émotion), avec des notes de fruits secs grillés qui complètent celles d'agrumes confits. Il y a aussi de l'ananas flambé au rhum, de la tarte tatin... Quel vin !

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Le dessert officiel, histoire de clore la boucle, s'appelle Stevenson / Jekyll & Hide et le voyage dans les Cévennes. Dès qu'on en mange une première bouchée, on  comprend l'allusion aux Cévennes  car la crème moelleuse est à base de châtaigne. En dessous, on retrouve  l'exotisme stevensonien avec le kumquat confit. Le contraste, c'est  Jekyll & Hide, un autre roman de Stevenson.  L'accord avec le riesling évoqué ci-dessus fonctionne parfaitement. 

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En bonus, au moment des 12 coups de minuit, une buche au matcha, framboise et vanille préparée par la maîtresse de maison, que David appellerait Miyazaki pour cette alliance réussie entre la France et le Japon.  

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La vodka qui apparaît à droite était très bonne, chose que je dis rarement pour ce type d'alcool. Elle était très douce, pas du tout agressive, avec un bon goût de froment. Faut dire qu'elle est distillée 5 fois. Ca doit éliminer les alcools les plus agressifs. 

Merci à Fred et David pour leur accueil !

Commentaires
F
Quel enchantement ! ça donne faim. merci pour ces belles idées ! J'aime bien aussi inventer mes je me loupe une fois sur deux.
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M
Merci pour toutes es belles découvertes et partages. Tous mes vœux pour cette nouvelle année.
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M
Un grand merci à vous pour tout ce que vous nous apportez tout au long de l'année ! Je vous souhaite une bonne année 2022 pétillante, douce et heureuse !
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Quand deux passions se rejoignent pour n'en faire qu'une: la gastronomie
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