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A boire et à manger
13 décembre 2021

Un moment d'exception à Pérégrinations

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Il y a deux mois, j'avais découvert la cuisine de Franck Gatefin à Buzançais. Mon compte-rendu a donné envie à mes amis de Limoges. Ils m'ont demandé s'il serait possible de mettre en place un menu avec le chef qui se marierait avec des vins que nous amènerions. J'ai donc transmis cette demande à Franck qui a répondu positivement. Notre bande a ensuite pas mal discuté pour trouver six vins qui pourraient s'enchaîner joliment. Puis j'ai échangé avec le chef pour mettre en place le menu ad hoc. La seule chose qui a été communiquée à mes amis est qu'il y aurait du lièvre à la royale, plat que nous aimons déguster chaque automne. Pour le reste, c'était la surprise totale. 

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Elle ne fut pas trop longue puisque Franck a imprimé un menu rien que pour nous. Mais l'autre surprise, c'est que nous sommes seuls dans le restaurant. Afin de se consacrer entièrement à notre bande, il a préféré "privatiser" la salle. Il faut dire qu'il est seul en cuisine (et sa femme Séverine assure le service en salle). 

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La sphère photographiée plus haut est composée de trois assiettes que Séverine déploie devant chaque invité. C'est une variation sur le foie gras, la pomme et le champignon. En bas, le foie gras (d'un fondant exceptionnel) est entourée d'une mousse au cèpe. À droite, la tartelette contient une espuma à la pomme, mais très rapidement, la croûte prend la relève, laissant très longuement un goût de champignon en bouche.  À gauche, une "terrine" au champignon, très délicate en saveur et texture, avec des fines allumettes de pomme fraîche apportant du contraste. 

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L'entrée est servie avec un Champagne Brut Grand Cru 2003 d'Egly-Ouriet (70 % Pinot noir, 30 % Chardonnay) apportée par Stéphane : La robe est d'un or intense presque cuivré, avec des bulles présentes mais peu nombreuses.  Le nez est puissant, sur le pain d'épices, le pralin, la pomme rôtie, labrioche toastée. La bouche est éclatante de fraîcheur tendue, élancée, déployant une matière concentrée, très intense aromatiquement – un bulldozer en tutu ! – avec des bulles ultra délicates et une grande vinosité. On  ressent ce que l'on peut éprouver en dégustant un grand cru rouge bourguignon, avec ce mix paradoxal entre puissance de dingue et toucher de bouche d'une infinie délicatesse. La finale est raccord mais encore plus tonique, avec des bulles plus crépitantes soulignées par l'amertume du citron confit et  le grillé de la brioche et du pralin . Magnifique !

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Puis nous passons à des langoustines tout juste saisies à la flamme, avec une rémoulade de celeri aux herbes et un jus de tête au yuzu et à la clémentine. La cuisson des crustacés est superbe, leur donnant une texture délicate, fondante tout en ayant une belle caramélisation des chairs. Et le jus de tête est une pure merveille. On en boirait des litres ! La rémoulade apporte une touche plus fraîche, plus croquante ét végétale, mettant encore plus en avant le reste du plat. 

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Ce Sancerre à mi-chemin 2017 de Vincent Gaudry est un vin que j'ai découvert il y a un bon mois et que nous avons fait rentrer de suite à Vins étonnants, car ce fut un grand coup de coeur. Il est certes très cher pour un Sancerre (110 €) mais il amène le Sauvignon à un niveau que je n'avais jamais rencontré (alors que j'ai pu boire ce qu'il se fait de mieux en la matière). J'en ai donc amené une bouteille pour le faire découvrir à mes amis : tout le monde a adoré ! 

La robe est jaune paille. Le nez tout en finesse évoque le citron confit, le beurre chaud et la craie humide. La bouche est très ample, aérienne, d'une douceur évanescente , avec une aromatique  à la fois confite et fraîche. Comme le champagne, même si à un degré moindre, on est saisi par le contraste entre l'expressivité du vin et son toucher très délicat. Il se conclue sur une très longue finale sur le citron, le cassis, l'ananas, la rose...

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Nous continuons avec un Saint-Pierre cuit à basse-température dans un beurre clarifié, avec des carottes en plusieurs textures , de la coriandre et un beurre d'orange et gingembre. 

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Mais aussi une endive caramélisée à l'orange (qui change tout au plat). La cuisson du poisson est là aussi au top. Et le mix orange / gingembre / endive est tout simplement jouissif et pourrait se suffire à lui-même tellement l'équilibre est parfait. Mais c'est sans compter sur le vin qui l'accompagne. 

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C'est un Riesling GC Rangen de Thann "Clos Saint-Urbain" 2007 du domaine Zind-Humbrecht que nous amené Olivier C.  Sa robe est superbe, rappelant l'or en fusion. Le nez est sublime, sur les agrumes confits, la mangue rôtie, la fumée, le pomelo, la rose, le gingembre.... La bouche toute aussi sublime, élancée, racée, avec une tension dinguissime, une matière envoûtante à la texure moelleuse, presque suave, d'une intensité bouleversifiante. La finale est dans la continuité, séveuse, intense , avec une queue de paon sur les agrumes confits, le gingembre, les terpènes, la fumée, les épices... Hénaurme vin  ... et accord magique avec le plat. 

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Puis il nous est servi un ris de veau avec une croûte caramélisée à souhait et un coeur très tendre, un jus  de veau qui l'a nourri et s'en est nourri, un peu de citron vert pour amener ce qu'il faut de fraîcheur. 

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Et une "fausse frite" à la truffe de Bourgogne. 

 

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Il accompagne un Meursault 1er Cru Clos des Perrières 2008 d'Albert Grivault qui provient de la cave de Stéphane. Sa robe est d'un or éclatant. Le nez est fin, aérien, sur le citron confit, la noisette grillée, le citron vert. La bouche allie ampleur et tension, avec une matière délicate, moelleuse, étirée par une acidité arachnéenne. Le tout est d'une grande fraîcheur. La finale est effilée  et tonique sur les  fruits blancs rôtis et la noisette, avec une fine touche fumée. Bu seul, il était bon. Avec les ris de veau, il devient excellent, le plat lui apportant plus de tonus et de volume, et lui faisant ressortir sa fraîcheur. 

 

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Et voilà le lièvre à la royale cuit 72 h à 63 °C. Cette basse température fait que la viande a encore beaucoup de mâche. Ce n'est pas une bouillie pour édentés. Franck n'aimant pas la peau, il a formé la ballotine sans celle-ci. C'est le foie gras de canard qui joue le rôle de liant. On n'en trouve pas de gros morceaux dans l'assiette, mais en fait, il est partout ;-) La sauce est divine, d'une intensité incroyable, avec une bonne acidité qui apporte un contrepoint indispensable au plat très riche. 

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Il est accompagné d'une purée d'héliante à la truffe de Bourgogne au goût naturellement doux. 

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J'ai amené ce Vino Nobile de Montepulciano 1990 de l'Azienda Poliziano. Sa robe est tuilée avec des reflets grenats. Le nez est intense, sur des notes  résino balsamique, les fruits noirs confits,  la baie de genièvre. La bouche est très ample, enveloppante, déployant une matière veloutée très douce, caressante, tout en offrant la fraîcheur percutante (mais pas agressive) d'un sangiovese toscan. La finale est encore plus fraîche, sur la résine et la garrigue. Un superbe vin à maturité qui fusionne totalement avec le lièvre. Du bonheur total !

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En fromage, j'avais juste demandé une pâte persillée (de la fourme d'Ambert) pour faire la transition avec le dessert, car nous avons prévu le même vin pour les deux. 

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Ce Jurançon La Quintessence 1992 du domaine Bru-Baché nous est offert par Olvier R. 

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Sa robe magnifique est entre le cuivre et l'ambre.  Le nez très intense est d'une complexité folle, sur  le pralin, le café, la truffe, l'ananas rôti. La bouche allie fraîcheur et voluptuosité, avec une acidité laser qui trace grave et une matière magique, suave, d'une intensité ahurissante. La finale monte encore dans l'intensité et la fraîcheur, sur la truffe, le toffee, l'ananas et l'orange confite. Peut-être le plus grand liquoreux que j'aie jamais bu. 

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Pour l'accompagner une sphère à base de mangue et de fruit de la passion...

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... contenant une crème à la bergamote, limequat et gingembre.  C'est frais, gourmand, pas trop sucré, et raccord avec le vin, avec du croquant amené par le biscuit (qui avait un côté spéculoos) situé sous la sphère. Bref, la fin est au niveau de tout le repas : excellente !

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De la première bouchée à la dernière, nous nous sommes régalés, avec un service comme nous l'avons rarement rencontré, puisqu'il ne tenait compte que notre propre timing. Les verres étaient changés  entre chaque vin. Idem pour les  couverts. 

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Et nous avions droit au début de chaque service à une présentation du plat par le chef, beaucoup plus détaillée que dans un restaurant ordinaire. Nous avons pu aussi longuement échanger avec lui à la fin du repas, sur les recettes, les vins (qu'il a tous goûtés). Nous avons vraiment vécu un moment d'exception comme un amateur en rencontre rarement. Pour cela, merci à Franck et Séverine !

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Quand deux passions se rejoignent pour n'en faire qu'une: la gastronomie
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